COMMUNIQUÉ DE PRESSE DE LA DIRECTION DU THÉÂTRE NOUVELLE GÉNÉRATION

EN RÉPONSE À LA SUPPRESSION DE LA SUBVENTION DE LA RÉGION AURA

Lyon, le 23 mai 2023

La suppression de la totalité des subventions au Théâtre Nouvelle Génération – Centre dramatique national de Lyon, lors de la commission permanente du conseil régional ce 12 mai, est donc venue entériner officiellement les déclarations de la vice-présidente Culture, tenues lors de la conférence de presse du 28 avril.

Le Centre dramatique national de Lyon ne sera plus aidé par la Région Auvergne-Rhône-Alpes, en 2023, sur un motif purement politique clairement exprimé. Aucune argumentation ni aucun critère objectif d’évaluation de la conduite de notre projet, ne sont venus nourrir cette décision brutale, prise en rétorsion de l’expression d’une opinion syndicale. Aucune concertation ni avertissement n’ont par ailleurs précédé cette annonce, exprimée par voie de presse. C’est donc ainsi, en dehors de tout cadre formel, que l’information a été découverte aussi bien par les salariés de notre équipe que par nos co-financeurs que sont l’État, la Ville de Lyon et la Métropole.

C’est donc ainsi que l’on traite du côté de la Région, un partenaire culturel historique, avec lequel s’est tissée une relation vieille de plus de 30 ans.

C’est donc ainsi que l’on traite les salariés permanents d’une entreprise de service public, dont le salariat repose, par nature et par définition de leurs missions, sur un financement public croisé.

Nous aurions pu espérer que les 15 jours séparant cette conférence de presse de la commission permanente, aient pu permettre à l’exécutif régional de revenir à la raison, de reconnaître son erreur de jugement et de revenir sur ces malheureuses paroles.

Rien n’en a été.

Aussi, par ce communiqué, et après avoir laissé le temps aux instances régionales de statuer en bonne et due forme sur la question, la direction du Théâtre Nouvelle Génération, souhaite désormais réagir officiellement à un certain nombre de propos mensongers, qui ont été tenus par Madame Sophie Rotkopf, lors de cette conférence de presse, à l’encontre de la direction, de la structure, de son équipe et de son projet.

Madame Sophie Rotkopf prétend que nous avons refusé le dialogue avec la Région

Nous ne pouvons accepter que la vice-présidente mente publiquement aux électeurs et aux habitants de la région en affirmant que la direction du TNG (et à travers elle l’ensemble de l’équipe du C.D.N) a décliné toute discussion avec la Région. C’est absolument faux. Tant sur le plan de notre structure, que sur le plan syndical.

 

  • Au titre du Centre dramatique national, le dialogue n’a en réalité jamais été rompu.Nous avons répondu à toutes les sollicitations des personnels du service Spectacle-vivant de la Région, qui eux-mêmes ont répondu aux nôtres, afin d’élaborer ensemble les projets du théâtre, comme le veut la procédure habituelle. À moins que Madame Sophie Rotkopf ne considère que ces échanges avec les membres de son service ne font pas partie du dialogue institutionnel entre la collectivité territoriale et notre structure, nous ne voyons pas sur quels éléments s’appuie son affirmation que nous refusons le dialogue. Et nous aurions été ravis de pouvoir la compter parmi nous, lors de nos différents comités de suivis, qui sont justement les instances officielles de dialogue multipartite entre les partenaires financiers publics (état, ville, région) et la direction du D.N. Ces comités permettent, entre autres, de contrôler les équilibres budgétaires, d’élaborer en concertation le projet de la structure et de fixer des objectifs et des critères d’évaluation. Nous l’avons évidemment invitée personnellement.  Nous lui avons même proposé des changements de dates, lorsqu’elle n’était pas disponible.  Mais elle n’est venue à aucun de ces rendez-vous et malheureusement, ses représentants n’avaient pas mandat pour pouvoir exprimer un avis, ni même partager aucune information. Si cela aurait pu se comprendre dans le cadre d’une perspective de poursuite à l’identique du projet et de la continuité de ses financements, sa présence aurait pourtant été requise sur une question aussi fondamentale, que la possible coupe de l’intégralité de la subvention du C.D.N.

 

  • Au titre de notre syndicat, Joris Mathieu s’est rendu disponible aux rares rendez-vous que la vice-présidente a daigné accorder à nos représentants, suite à des demandes répétées.Deux rendez-vous, en tout et pour tout, en dehors des COREPS, depuis son élection. À l’occasion du premier rendez-vous du 28 mars 2022, le SYNDEAC par la voix de Joris Mathieu, a explicitement fait savoir à la vice-présidente que le développement de la politique culturelle sur les territoires ruraux et éloignés des centres urbains, était un enjeu de travail important, que les structures culturelles adhérentes du syndicat partageaient. Que les cahiers des charges de ces lieux, comme le TNG, nés de la décentralisation, étaient conçus pour intégrer pleinement ces missions, et que nous étions désireux et prêts à y travailler avec la Région. À cette main tendue (nous reprenons ici volontairement l’expression de l’exécutif) la vice-présidente n’a jamais répondu. Au contraire, elle y a implicitement opposé une fin de non-recevoir, puisqu’elle a fait le choix de statuer seule et sans concertation. L’expression des désaccords de la profession portés par Joris Mathieu, concernait ainsi davantage les méthodes employées et l’absence de concertation choisie par la vice-présidente, que les enjeux de développement de la décentralisation auxquels il est faux de dire que le C.D.N refuse de participer.

 

Madame Sophie Rotkopf a affirmé que l’équilibre du projet du C.D.N. ne serait pas compromis par le retrait de la Région.

Elle a ainsi une nouvelle fois énoncé un point de vue sans fondement, qui est totalement contredit par la réalité de nos budgets prévisionnels 2023, connus par elle et ses équipes puisqu’ils ont été présentés lors du dernier comité de suivi le 1er février 2023.

D’abord, ce n’est pas 149 000 €, mais 175 000 € de subvention publique que la région a retiré en deux ans au TNG.

Rappelons que la notification d’attribution de la subvention régionale 2022, stipulait explicitement que la diminution de 15 % de notre subvention était une mesure « temporaire » justifiée par un effort de solidarité demandé à notre structure dans une période post-covid, pour que la Région puisse soutenir d’autres acteurs davantage fragilisés par la crise. Il est à ce titre désormais explicite que ce prétexte était déjà mensonger à l’époque puisque pratiquement aucune des 140 structures impactées par une baisse l’an dernier, n’ont retrouvé, en 2023, un niveau de financement identique à 2021. Cette notification formelle, reçue à l’été 2022 faisant foi, et en l’absence d’alerte préalable des services de la Région lors de nos comités de suivis, nos budgets prévisionnels étaient en toute logique établis sur la base de cet apport de 175 000 euros de la Région. Il ne nous appartenait pas de spéculer sur une possible pérennité d’une baisse présentée comme « temporaire » via une notification officielle.

La décision récente, prise brutalement et unilatéralement, sans concertation avec notre équipe, sans concertation avec le service culturel de la région – qui connaît très bien l’activité que nous menons sur le territoire Auvergne-Rhône-Alpes – nous conduira inévitablement à un déficit financier conséquent en fin d’année 2023, dont la Région portera en grande part la responsabilité. Une responsabilité liée tant à l’inconséquence de cette décision, qu’à son caractère extrêmement tardif.

Pour la deuxième année consécutive, ces annonces interviennent en milieu d’exercice budgétaire, alors que toutes nos actions sont déjà engagées. Pour la deuxième année consécutive, sans l’intervention de l’État – qui à titre exceptionnel a versé l’intégralité de sa subvention en une seule fois en début d’exercice budgétaire – nous (comme un grand nombre de collègues) aurions été en déficit de trésorerie, dès le mois de mars 2023. Ainsi, nous aurions été contraints de contracter des emprunts bancaires pour couvrir le fonctionnement de notre structure et pouvoir verser les salaires de nos équipes. Différer les votes des subventions, annoncer des coupes budgétaires en cours d’exercice, conduit inévitablement à ce type de situation.

Comment une présidence de Région, qui se prétend la mieux gérée de France, peut-elle assumer sereinement que le délai excessif de ses prises de décisions conduise à ce que l’argent public finance des intérêts bancaires ou place ses bénéficiaires en situation de créer des déficits de gestion publique ?

Nous avons déjà dans le passé été confrontés à des coupes budgétaires décidées par certaines collectivités. Mais jamais nous n’avons été confrontés à des prises de décisions non-anticipées, sans aucune explication préalable et sans une anticipation indispensable à l’amortissement budgétaire de leur impact.

 

Madame Sophie Rotkopf a prétendu que nous étions dans une tour d’ivoire, que nous refusions de travailler avec la Région et que nous méprisions les habitants hors métropole.

C’est une insulte à nos valeurs, au travail quotidien que nous menons avec toute l’équipe du théâtre, à notre investissement et à notre engagement, à la démocratisation culturelle que nous défendons avec force auprès de tous les publics, qu’ils soient urbains, banlieusards ou ruraux.

Nous programmons des artistes qui rencontrent et rassemblent des chasseurs, des agriculteurs, des pisciculteurs, des entrepreneurs, des artisans, des amateurs et amatrices de chant, de musique, de théâtre et de danse… de tous âges et de tous milieux. Le TNG travaille en coopération avec les Communautés de Communes. Nous produisons et programmons des œuvres inclusives et participatives.

La vice-présidente de la Région aurait pu s’en rendre compte si elle avait franchi les portes du TNG et pris connaissance de ses actions et de son rayonnement à l’échelle régionale et au-delà, car notre mission est aussi de sortir de la région et de faire circuler les œuvres vers d’autres horizons et d’autres publics.

Mais peut-être que là aussi, évaluer les projets sur la qualité et la réalité de l’exécution de missions de décentralisation, n’a en fait jamais été le véritable sujet. Cette politique de la décentralisation qui est inscrite dans notre cahier des charges, sur laquelle nous avons proposé de travailler avec la Région, n’a rencontré que son indifférence.

En ce qui nous concerne, en tant que membres de la direction d’un établissement porteur de missions de service public de la Culture, nous avons une conscience extrême du fait que l’argent public qui nous est confié ne nous appartient pas. Notre théâtre est redistributeur de cet argent public qui finance les projets artistiques en région en direction de ses habitants.

  • Nous coproduisons et diffusons des spectacles de compagnies régionales :

58 compagnies de la région ont bénéficié du soutien du CDN depuis notre arrivée à la direction.

  • Nous accueillons des équipes artistiques en résidence, qui bénéficient ainsi d’une salle équipée, d’un soutien technique et parfois administratif, pour créer des projets artistiques qui tourneront par la suite dans toute la région et en France :

cela représente 245 jours de résidences en moyenne chaque année.

 

  • Nous produisons des spectacles et des installations numériques culturelles innovantes dédiées à la tournée en milieu rural.Et nous organisons, à cette occasion des résidences artistiques puis la diffusion de ces œuvres dans les territoires éloignés des centres urbains :

En moyenne annuelle, cela représente 25 représentations organisées en décentralisation, 150 jours de présence de nos dispositifs numériques dans les médiathèques, les établissements scolaires, les associations, les centres sociaux, les annexes des mairies… En termes budgétaires, c’est plus de 10% de notre budget qui est consacré à ces activités, quand le financement de la Région ne représentait que 6% du budget de la structure. En termes d’activité, c’est plus de 15% de nos levers de rideaux qui ont lieux hors les murs du C.D.N.

 

  • Nous mettons en place des ateliers de pratiques artistiques et des actions de médiation en direction de la jeunesse, en EHPAD, en milieu hospitalier, dans les centres sociaux :

En moyenne, nous travaillons ainsi en partenariat avec plus de 50 structures par an et nous proposons plus de 1000 heures d’ateliers de pratiques artistiques aux élèves des établissements scolaires de la métropole et de la région.

 

  • Le TNG co-préside le réseau Jeune public Domino qui réunit près de 60 membres sur l’ensemble de la région (lieux culturels, équipes artistiques, bureaux de production et de diffusion).
  • Chaque année, nos intervenants artistiques s’investissent dans l’accompagnement de l’opération emblématique de la Région qu’est le prix littéraire des Lycéens et des apprentis Auvergne-Rhône-Alpes.
  • Nous avons accueilli dans nos murs, les deux dernières éditions de la Rentrée littéraire de l’Agence Auvergne-Rhône-Alpes Livre et Lecture.

 

C’est donc sur ce bilan, que la vice-présidente s’appuie pour dire que le Théâtre Nouvelle Génération refuse de travailler avec la Région.

C’est donc ce bilan, qu’elle résume en formulations mensongères à la presse, en prétendant que nous sommes enfermés dans une tour d’ivoire et que nous méprisons les habitants de la région en dehors de la métropole.

La réalité de notre activité a été totalement ignorée et passée sous silence. Cela ne peut avoir été fait que par commodité ou par ignorance.

 

Lorsque les élus s’égarent ainsi dans le mensonge, c’est toute la confiance des électeurs et des citoyens qui vacille. C’est une atteinte grave à la probité que chacun attend d’un élu en démocratie.

En supprimant la subvention régionale, la vice-présidente anéantit précisément notre travail et celui des artistes auprès des habitants de la région. Elle prive les destinataires du bénéfice de la subvention, c’est à dire les habitants, ceux-là mêmes à qui elle promet une culture de proximité.

En supprimant la subvention régionale au TNG, elle entrave, en feignant de l’ignorer, tout ce qu’elle prétend prôner comme développement culturel du territoire.

En supprimant cette subvention, elle met en péril l’économie du C.D.N, alors même que nous sommes déjà très fortement impactés par l’inflation, à l’instar de l’ensemble des autres institutions culturelles. Sans résolution positive de cette situation financière, cette suppression de notre financement impactera directement les équipes artistiques qui dépendent de notre soutien et les emplois au sein de notre structure. La Région privera ainsi à l’avenir le public du TNG d’un tiers de sa programmation.

En supprimant la subvention du TNG, la Région compromet gravement la politique d’accessibilité tarifaire à toutes et tous, car la subvention publique a pour objet principal de minimiser le prix du billet et donc de favoriser la démocratisation de l’accès à la culture.

En supprimant la subvention régionale du TNG, la présidence du conseil régional menace un projet qui se destine à l’enfance et à la jeunesse : 69 % du public à moins de 28 ans. Autant de sorties culturelles, de spectacles à découvrir, d’ateliers de pratique artistiques qui n’auront plus lieu pour les jeunes spectateurs. 

Est-ce le message que l’exécutif souhaitait adresser à la jeunesse de la région qu’il préside ?

En supprimant sa subvention régionale, la présidence de Région renonce à soutenir un projet artistique et culturel innovant, tête de pont de la création numérique pour le spectacle vivant en région et en France. Les productions théâtrales numériques du TNG tournent en France et à l’international. Notre équipe artistique et technique est plébiscitée pour son expertise dans tous les réseaux artistiques numériques.

Est-ce le message que la Région souhaite adresser à ceux qui contribuent à l’innovation sur le territoire régional ?

 

Enfin, la direction du Théâtre Nouvelle Génération, regrette que la présidence de Région ait fait le choix de personnaliser un conflit qui l’oppose en réalité à l’ensemble des syndicats et organisations professionnelles du territoire. En cherchant à polariser le débat sur un individu, la région semble chercher à minimiser l’ampleur de ce conflit et à faire un exemple Ad hominem sur la place publique.  Sanctionner ainsi un projet, une équipe, des artistes, sur la base de l’expression syndicale de son directeur, est à la fois indigne et sans critère objectif valable. Pour sa part, le TNG continuera, tant que faire se peut, malgré la perte significative de ses moyens, à sillonner la région pour poursuivre ses activités au service de tous les habitants de la région, pour défendre des valeurs qui permettent de tisser du lien, à organiser l’aller-retour entre centres urbains et ruralité, plutôt que de chercher à diviser les habitants de ce territoire.

Malgré les différends qui l’opposent aujourd’hui à la Région, la direction du Théâtre Nouvelle Génération renouvelle, ici, son intention de rester ouverte au dialogue.

Nous continuerons, avec l’ensemble des syndicats, à appeler de nos vœux la Région à se conformer au respect de la concertation et du dialogue avec les professionnels de notre secteur, ainsi qu’avec les différents élus des différentes collectivités, quelles que soient leurs étiquettes politiques.

Bien que l’intensité du désaccord soit aujourd’hui extrêmement élevée, il n’est jamais trop tard pour se remettre sur une voie plus constructive. Cela relève même de l’intérêt général qui préside à la mise en œuvre d’une politique publique culturelle à laquelle nous sommes fortement attachés et dévoués.

 

La direction du Théâtre Nouvelle Génération – CDN de Lyon

Joris Mathieu, directeur

Céline Le Roux, directrice adjointe

Vanessa Lassaigne, administratrice générale

Télécharger le communiqué de presse